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MORIN KHUUR & URTIIN DUU
30 mars 2009

LA MONGOLIE DEPUIS LE XVIe SIÈCLE - MONGOLIE ET PAUVRETÉ - INDICE DE GINI

V2 2013-07-12 Ajouts dont un dernier paragraphe sur l'évolution révente
V1 2009-03-30


La Mongolie depuis le XVIe siècle

Mongolie et pauvreté -
Explication de la courbe de Lorenz
et de l'indice de Gini des revenus


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Conseil pour naviguer sur ce blog
 
Pour écouter le morin khuur (vièle-cheval), l'urtiin duu (chant long) et d'autres chants mongols, pour voir des costumes traditionnels, ...
consultez la liste des principaux articles du blog:

Sur les chemins du long voyage
http://mongoliamusic.canalblog.com/archives/2010/02/18/16855989.html
 
 
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Pour un article sur les perspectives économiques
actuelles pour la Mongolie, consultez
http://mongoliamusic.canalblog.com/archives/2010/02/16/16935607.html

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Pour une réflexion sur la pauvreté et la misère,
vous pourrez consulter les blogs suivants:

http://miseremisery.canalblog.com/
http://looforqin/canalblog.fr/
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Mongolie et colonisation(s)

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Au XVIème siècle, les chefs Mongols sont convertis par les Bonnets jaunes (une lignée du bouddhisme tibétain) qui étendent ainsi leur emprise sur la Mongolie. Il s'agit bien d'une colonisation religieuse. Les Mongols étaient jusque là « un peuple à chamanes ».
>> Sur le chamanisme, voir l'article
'' LE CHAMEAU QUI PLEURE - MONGOLIE - PAYS - CULTURE - CARTES ''
Vous y trouverez des liens pour approfondir.
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Et, soit dit en passant, les Bonnets jaunes trouvaient dans cette expansion un moyen de s'affirmer face à leurs éternels rivaux, les Bonnets rouges. Le bouddhisme tibétain n'est pas monolithique et les enjeux de pouvoir existent chez les bouddhistes comme dans les autres religions...

Dans la longue histoire de la papauté, certains papes ont été empoisonnés: un mode opératoire discret, efficace et qui (à l'époque) laissait peu, voire pas, de traces discernables. Un ange passe... (si j'ose dire).
Dans la longue histoire du bouddhisme tibétain, il est arrivé la même mésaventure à des dalaïs-lamas, supprimés avec efficacité et discrétion par un clan rival.
Vous comprenez bien que, les passions humaines étant de tout temps et partout similaires, le désir de s'emparer du pouvoir a suscité des comportements similaires dans des clergés (catholiques / bouddhistes) fort éloignés les uns des autres.
Au final, c'est bonnet blanc et blanc bonnet... (si j'ose dire !)

Mais revenons à nos moutons (et chèvres et chevaux et chameaux)...
il faut bien insister sur un point.
>> En Mongolie, avant le bouddhisme, il y avait une culture originale et au coeur de cette culture, une religion : le chamanisme.
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Au-delà de cette colonisation religieuse par les Bonnets Jaunes (au XVIIème siècle), si vous regardez une carte, vous verrez que la Mongolie - territoire immense mais faiblement peuplée - est enclavée entre deux immenses et puissants voisins, la Russie et la Chine. Donc vous avez deux zones d'influence en terre mongole : la zone d'influence russe, territoire aujourd'hui indépendant : la Mongolie. Et puis la zone d'influence chinoise, province de la Chine : la Mongolie intérieure.
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Les peuples mongols - une population peu nombreuse - ne peuvent que difficilement s'émanciper de l'influence de leurs deux puissants voisins.
Ceci est illustré par l'histoire du territoire indépendant au XXème siècle. Lorsque le système impérial chinois - très mal en point depuis les deux Guerres de l'Opium et les Traités Inégaux -, lorsque donc le système impérial chinois s'effondre définitivement en 1911 (fin de la dynastie Qing), la Mongolie déclare son indépendance, mais cette indépendance aura beaucoup de mal à entrer dans les faits. D'ailleurs, l'influence russe devient bientôt l'influence soviétique, très prégnante : la révolution russe se déclenche en 1917 et dès 1924 est proclamée la République populaire de Mongolie. Les décennies qui suivent montrent que le cours des affaires mongoles suit étroitement le régime de l'URSS. Après la pérestroïka russe et la chute du mur de Berlin en 1989, l'onde de choc atteint rapidement la Mongolie où se produit une « Révolution démocratique » avec son corollaire: une entrée brutale dans l'économie de marché.
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Mongolie et pauvreté.
Une transition brutale vers l'économie de marché.
Augmentation des inégalités.

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Si vous voulez lire une réflexion de fond sur la pauvreté et la misère,
consultez la page suivante :
http://miseremisery.canalblog.com/
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Dans la première décennie du XXIème siècle, même s'il y a une classe moyenne en Mongolie, il y a aussi - et surtout - beaucoup de pauvreté. À tel point que des industriels ont installé des usines textiles en Mongolie, pour la bonne raison qu'ils pouvaient payer les ouvrières moins cher qu'en Chine. C'est dire...
Sans doute ce type d'implantation fait-il partie de ce que les technocrates occidentaux désignent globalement comme un « remarquable succès de la transition vers la démocratie et l'économie de marché ».

Ce « remarquable succès » s'accompagne d'inconvénients notables pour une grande partie de la population, notamment les ruraux et, de façon générale, les plus modestes. En effet, les services de l'État sont de moins en moins efficaces ( par rapport à la période soviétique prise comme référence historique), et ces services de l'État sont concurrencés par des services privés, beaucoup plus coûteux et seulement accessible à une petite partie de la population : la clientèle solvable. Concrètement, pour les gens des zones rurales et pour les pauvres des villes (souvent des ruraux obligés de renoncer à leur mode de vie traditionnel), la qualité de l'éducation et des soins médicaux a décliné. Seuls les Mongols les plus aisés ont accès aux soins médicaux privés de qualité , seuls les Mongols les plus aisés peuvent envoyer leur progéniture dans les universités privées, et même dans les universités étrangères. D'un point de vue des motivations individuelles, les enseignants et le personnels soignants ont tout intérêt à migrer du système d'État vers le secteur privé.
Enfin le taux de chômage est élevé.
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La fameuse « transition » - bel euphémisme technocratique - « vers la démocratie et l'économie de marché » a donc conduit à une inégalité sociale croissante : ce n'est pas un sujet de polémique, c'est un constat, réalisé entre autres par les économistes de la Communauté Européenne. On peut objectiver ce constat en mesurant les inégalités de revenus.
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Mesure des inégalités de revenus
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On mesure souvent les inégalités de revenus dans un pays par un indice synthétique,
l'indice de Gini [des revenus].
Ici 3 possibilités... Vous voulez
(1) Comprendre l'indice de Gini :
partie 'Méthodologie', en police marron, (avec graphique).
(2) Juste des données sur différents pays :
partie 'Données commentées', en police marine.
(3) Vous voulez sauter cette partie : déroulez jusqu'à retrouver la police noire.
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(1-A) Méthodologie
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L'indice de Gini
est un indice de concentration, calculé généralement pour les revenus, dans un pays donné : indice de Gini des revenus.
Cet indice permet de mesurer la concentration des revenus dans un pays, autrement dit, il permet d'aborder les inégalités de revenus, dans un pays donné.
L'indice de Gini est sans unité - c'est en fait un pourcentage. On peut comparer les indices de Gini de différents pays, ce qui permet d'avoir une idée du degré d'inégalité des revenus dans tel pays par rapport à tel autre.
L'indice de Gini est compris entre 0 et 1. La valeur 0 correspondrait à une égalité parfaite ( même revenu pour tous les ménages ). La valeur 1 correspondrait à une inégalité totale ( un seul ménage reçoit tous les revenus du pays).
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La distribution des revenus ( ''distribution'' au sens statistique mais aussi au sens comptable), la distribution des revenus évolue au fil du temps dans chaque pays. Si vous trouvez une source vous donnant un coefficient de Gini des revenus sans vous donner l'année, fuyez cette source ! La date des dernières donnés disponibles varie selon les pays.
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(2) Inégalités de revenus par pays : données commentées
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Évolution au fil du temps dans un pays, exemple de la Chine.
L'ère Deng Xiao Ping (ce dirigeant chinois qui avait lancé le slogan "Qu'importe qu'un chat soit blanc ou noir pourvu qu'il attrape les souris") a vu l'émergence foudroyante du capitalisme à la chinoise. Conséquence : pour la Chine, le coefficient de Gini des revenus a grimpé.
En 1982, vers le début de la fameuse "inflexion" lancée par Deng Xiao Ping, le coefficient de Gini des revenus en Chine était de 0,26 * : cette valeur faible indique que la société chinoise de l'époque était encore très égalitaire. ( Source: Banque Mondiale, graphique, in "wdr2006_outline")
En 2001, le coefficient de Gini des revenus était passé à 0,445 : un grand bond en avant... pour les inégalités en Chine. C'est le dernier chiffre dont je dispose pour la Chine. Il est est certain qu'en 2009, le coefficient de Gini des revenus pour la Chine se situe à une valeur encore plus élevée, ce qui fait désormais de la Chine la cousine germaine de... l'Amérique latine, en terme d'inégalités. (Source : "Le dessous des cartes") Un grand chemin parcouru en peu de temps. Mais on pourrait faire des remarques similaires pour d'autres anciennes économies communistes, comme la Bulgarie, sans parler de la Russie...
Pour la Russie en 1995 : 0,49. Avant la "transition", le coefficient de la Russie était de 0,24 (Source: Banque mondiale).
Le Brésil doit se situer encore au-dessus de la Chine puisqu'en 2001, son indice de Gini des revenus était de 0,593 :une valeur très élevée.
Pour le Mexique en 2000, 0,546.
Pour les USA en 2000 : 0,408.
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(1-B) Méthodologie (suite de 1-A, avec graphique)
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Remarque : si on a des données fiables pour les patrimoines- on peut calculer un indice de Gini pour les patrimoines. Les patrimoines sont encore plus concentrés que les revenus, en gros parce que les bas revenus ne peuvent épargner, tandis que les hauts revenus peuvent épargner et accroître - encore plus - leur patrimoine.
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Comme la présentation de l'indice de Gini - ou ''coefficient de Gini'' - n'est pas toujours très pédagogique, plutôt que de balancer une formule, je vais expliquer comment on construit un indice de Gini pour les revenus.
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COURBE_DE_LORENZ___INDICE_DE_GINI
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Il faut d'abord connaître les revenus disponibles de l'ensemble des ménages d'un pays (Le mot ''ménage'' est un terme statistique pour désigner les gens qui vivent dans un même logement.) (L'expression ''revenu disponible d'un ménage'' désigne le revenu disponible après prélèvement des impôts et cotisations sociales et après versement des diverses prestations sociales [quand il y en a...]). Et quand on a estimé, avec autant d'exactitude que possible..., le revenu disponible pour chacun des ménages d'un pays, on ordonne ces ménages par revenus croissants, depuis les ménages qui ne gagnent rien jusqu'au ménage qui reçoit le revenu maximal. Bien. C'est très important d'ordonner par revenus disponibles croissants parce que c'est la base de l'opération suivante : la construction de la courbe de Lorenz. Pour cette courbe, on met en abscisse un cumul de population, en pourcentage du nombre total de ménages. Et en ordonnée, on va mettre un cumul de revenu, en pourcentage de la somme de tous les revenus. Donc, avant de pouvoir placer un point de la courbe de Lorenz, il faut calculer le nombre total de ménage - noté M(100) - et le cumul des revenus pour l'ensemble des ménages - noté R(100). Dans cette notation, 100 signifie qu'on prend en compte 100% des ménages. Vous suivez ?
Comment va-t-on construire cette courbe de Lorenz (ici pour les revenus des ménages) ?
On connaît le nombre total de ménages, M(100). Donc on sait calculer 10% de M(100), on calcule M(100)x(10/100) qu'on peut noter M(10), 10 indiqant que ce chiffre corresponde à 10% des ménages.
Puisqu'on a ordonné les ménages par revenus croissants, on est capable de calculer le cumul de revenus pour les 10% de ménages les plus pauvres. On obtient un total de revenus qu'on va noter R(10), 10 pour rappeler que cela concerne 10% des ménages, en l'occurrence le 10% le plus pauvre.
Ce cumul des revenus des 10% de ménages les plus pauvres, on le divise par le cumul des revenus pour l'ensemble des ménages du pays. Autrement dit, on calcule R(10)/R(100) : c'est la part des revenus des 10% de ménages les plus pauvres rapporté aux revenus de l'ensemble des ménages. OK ?
Eh bien, on peut placer déjà placer un point de la courbe : en abscisse, on coche 10% (le 10% de ménages les plus pauvres) et en ordonnée on coche R(10)/R(100) : par construction, c'est un pourcentage.
On continue, et en suivant le même principe, on place sur le graphique les points correspondants aux 20% des ménages les plus pauvres, aux 30% des ménages les plus pauvres etc.
Remarquons que les deux points extrêmes de la courbe de Lorenz sont connus :
# à 0 % de la population des ménages correspond 0 % des revenus cumulés.
# à 100% de la population des ménages correspondent 100% des revenus cumulés.
Pour plus de détails, lire la note de lecture du graphique.
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Fin de la partie méthodologie.

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(3) Article : suite et fin
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Pour en revenir aux influences exercées sur les peuples mongols par les deux grandes puissances voisines, et maintenant l'Occident (notamment les USA); ces trois influences peuvent être étudiées en parallèle ( i1 à i3).
 
- (i1) L'influence chinoise

Dans la province chinoise (Mongolie intérieure) les enfants des peuplades mongoles apprennent le chinois à chinois, mais - d'après ce que je sais - ils peuvent aussi y apprendre le mongol. Le gouvernement de la province de Mongolie intérieure préfère utiliser l'expression "öbür monggol" (Mongolie du sud) alors que la traduction du "Mongolie intérieure" devrait normalement être "dotood monggol". Il faut savoir que l'habitude de désigner les deux territoires mongols par les termes "extérieur" et "intérieur" provient des Mandchous, qui ont régné sur la Chine, ce peuple du Nord est un voisin des Mongols. Il faut aussi que dans la région autonome de Mongolie, les mongols ne constituent que 17% de la population: 79% de la population est constitués par l'ethnie Han (majoritaire en Chine). Les Mongols se subdivisent en tribus, les Ordos sont une des tribus mongoles de la Mongolie intérieure.
La forte présence des Han résulte d'une politique menée par le pouvoir central chinois. En fait, la politique d'installation des Han remonte au XIXème siècle, sous la dernière dynastie impériale, la dynastie Qing (1644-1911).
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D'un côté, les Mandchous, en 1640-1642, battent les armées de la Chine des Ming (dynastie impériale en place depuis 1368) et de l'autre cette Chine des Ming est minée par les révoltes contre un pouvoir impérial qui prélève des taxes trop lourdes pour assurer son train de vie fastueux. En 1644, un général de l'armée des Ming s'allie aux Mandchous pour combattres les troupes (Ming) rebelles !...
C'est ainsi que les Mandchous parviennent au pouvoir et fondent la dynastie Qing (1644-1911). Les Mandchous ont leur propre langue, qui va d'ailleurs devenir la langue officielle de la dynastie Qing. Mais jusqu'au XVIIème siècle, les Mandchous ne possédaient pas d'écriture ! C'est le second empereur de la dynastie Qing, Huang-Taiji, qui va confier à un savant mandchou le soin de composer une écriture, inspirée de celle du mongol. Aujourd'hui, la langue mandchou est pratiquement éteinte...
Les Mandchous constituent dans la Chine d'auhourd'hui une ethnie reconnue, comptant environ 10 million de personnes, contre 1,2 milliards pour l'ethnie majoritaire, les Han.
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Le joug de la dynastie Qing sur les tribus mongoles n'était pas des plus tendres...
En vue de calmer des troubles, le pouvoir impérial Qing offrit des terres du nord aux paysans chinois, c'est ainsi que commença la colonisation par les Han des terres de la "Mongolie intérieure".
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Cette colonisation déjà ancienne aboutit à l'inclusion des territoires désignés comme "Mongolie intérieure" dans la République chinoise proclamée en 1911. (Repère pour ceux qui ne sont pas familiers avec l'histoire de l'Asie: il ne s'agit pas encore de la République populaire de Chine qui sera créée en 1949 ! )
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Aujourd'hui les Han se concentrent dans les villes, tandis que les Mongols sont plutôt dans l'espace rural et les bourgs. Évidemment, dans la Mongolie intérieure comme dans le reste de la Chine, la langue des études approfondies et de la réussite sociale est le chinois.
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Au sein de la Chine, les Mongols constituent une ethnie composée d'environ six millions de personnes. Sa langue est reconnue et même enseignée, mais la langue des études supérieures et de l'intégration dans la vie économique est bien sûr le chinois.
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Le mode de vie pastoral des éleveurs nomades (Mongols) est plus que menacé, les meilleures terres étant accaparées par l'agriculture (assurée par les représentants de l'ethnie majoritaire, les Han).
En fait, en Mongolie intérieure, Les Mongols qui veulent assurer un avenir à leurs enfants ont intérêt à s'installer dans les villes et à laisser leurs enfants suivre des études supérieures en chinois. La langue mongole est marginale dans la vie économique, et ceci, en Mongolie intérieure, pose davantage question que la disparition du mode de vie traditionnel.

En Mongolie indépendante, quel avenir pour le mode de vie traditionnel?

Pour revenir à la Mongolie indépendante, nombreux sont les éleveurs à rejoindre les villes où ils végètent dans des conditions précaires. Certains hivers, très rudes, peuvent tuer des millions de moutons...

Les jeunes filles de Mongolie indépendantes qui sont issues de familles nomades sont scolarisées dans des écoles sédentaires, implantées dans de petits bourgs. Elles reviennent dans leur famille à l'occasion des vacances. Pour ces jeunes filles, l'avenir qui leur ouvre le plus de possibilités, c'est de poursuivre leurs études, c'est d'aller dans les villes, pour y trouver une vaste palette d'opportunités de tous ordres, en terme de métier, de distraction, de confort, d'accès à la vie moderne.

Il est un peu trop facile pour les Occidentaux - confortablement installés dans la vie moderne - de célébrer les modes de vie traditionnels et de regretter leur disparition...
Sur toute la surface de la Terre, les modes de vie traditionnels sont menacés. Mais dans toutes les populations où
ces modes de vie se perpétuent, les nouvelles générations n'ont pas envie de vivre à l'écart des nombreuses possibilités de la vie moderne !

- (i2) L'influence soviétique

- Dans le Mongolie dite indépendante, on emploie beaucoup, comme jadis, l'alphabet cyrillique pour transcrire le mongol, et on utilise encore beaucoup la langue russe. Dans le film « Le chameau qui pleure », le personnage du chauffeur routier vient de Russie et s'exprime en russe avec les Mongols. Ce film présente d'indéniables qualités documentaires.

Il ne faudrait pas croire que l'influence soviétique ait été particulièrement bénéfique (par rapport à l'influence chinoise).
Sous l'ère de l'URSS, la Mongolie dite indépendante est en fait un protectorat soviétique... avec de nombreuses conséquences économiques et culturelles.
Auparavant, les mongols utilisaient une écriture dite traditionnelle, dérivée de l'écriture ouïgour, elle-même dérivée des écritures sémitiques telles que l'arabe. Les textes s'écrivaient de haut en bas, puis de gauche à droite. L'influence soviétique, entraînant l'usage de l'alphabet cyrillique pour transcrire le mongol, a rendu difficile l'accès des mongols aux anciens textes de leur propre culture !

(i3) L'influence américaine en Mongolie indépendante

Enfin, suite à la chute du mur de Berlin, avec la brutale transition vers l'économie de marché -, l'influence culturelle américaine s'est affirmée en Mongolie indépendante.
L'alphabet latin est donc également utilisé pour transcrire le mongol.
Et un certain nombre de Mongols ont émigré aux USA, mais ce rêve n'est accessible qu'à une petite partie de la population.

Vous avez dit "Empire", "Colonisation" ?

Revenons un instant au XIIIème siècle. L'empire mongol allait de la Mer Noire jusqu'à la Mer de Chine méridionale et du Golfe Persique jusqu'à la Mer du Japon. Il formait un grand bloc d'Asie, comprenant des villes commes Moscou, Bagdad, Pékin. Les mongols était un ''peuple à chamanes'' et non un 'peuple à dieu'', ce qui leur donnait dans le gouvernement de l'empire une sorte de distante tolérance par rapport aux religions des peuples soumis. Mais l'empire comprenait en particulier le Tibet, et au XVIème siècle, les Bonnets Jaunes - une école du bouddhisme tibétain - conquiert jusqu'au souverain, Alta Khan.
Je parlerai ici d'une véritable colonisation religieuse qui va s'avérer néfaste d'abord pour l'empire mongol, mais aussi pour les mongols eux-mêmes.

Donc, sans oublier la colonisation religieuse - déjà ancienne - par les Bonnets jaunes tibétains, les Mongols pris en sandwich entre l'influence russe et l'influence chinoise pourraient en dire long sur la colonisation. Et les mongols pourraient également en dire long sur les effets de la colonisation économique et culturelle par l'économie de marché et la société de consommation : les services de qualité (santé, éducation) ne sont financièrmeent accessibles qu'à une petite partie de la population.

Conséquences de l'évolution historique :
la culture traditionnelle mongole est en danger


Pour un peuple numériquement faible situé entre deux puissants empires, la colonisation est un destin presqu'inévitable, et pour préserver la culture mongole, il faut faire bien des efforts.
On saluera donc à ce titre l'inscription par l'Unesco de la musique traditionnelle du morin khuur au Patrimoine immatériel de l'Humanité.

Mais cette démarche est significative: la culture traditionnelle est en danger, davantage menacée encore que le mode de vie traditionnel.
Comme toutes les industries de l'entertainment dans le monde, l'industrie mongole diffuse des musiques inspirés des courants mondiaux : rap, R&B, pop...
Même un concert de musique traditionnelle, urtiin duu (chant long) ou morin khuur (vièle-cheval) s'éloigne à grand pas de la tradition. Le jour de morin khuur aura tendance à jouer plus dans l'aigu, pour avoir un son plus brillant et séduire davantage son auditoire de citadins et de touristes. Les chanteuses ou chanteurs d'urtiin duu se verront gratifier, bien souvent, d'une accompagnement moderne, bruyant, facile à créer avec les moyens modernes, alors que dand la tradition l'urtiin duu n'est accompagné que d'un simple morin khuur.
Et parmi les Mongols qui ont fait des études supérieures, beaucoup restent aux USA (où ils ont fait leurs études) ou cherchent à partir pour ce pays qui offre des perspectives de carrière et de confort de vie sans équivalent en Mongolie.

Pendant ce temps, en Monglie même, pour beaucoup de Mongols dont les conditions de vie sont très difficiles, l'essentiel est de survivre...
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Conditions de vie difficiles en Mongolie : survivre
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Étant donné les conditions de vie d'une grande partie de la population mongole - niveau de vie très bas, système de santé peu efficace pour les gens modestes -, des maladies infectieuses comme la tuberculose peuvent se développer.
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La vie des éleveurs nomades est extrêmement rude...
Sur l'année les températures peuvent varier de -40°C à +35°C, et entre la nuit et le jour la température peut passer de -5°C à +30°C en automne et au printemps. Si l'été est sec, le fourrage manquera pendant l'hiver...
La Mongolie a traversé en 1999-2000 et 2000-2001 deux hivers - consécutifs...- particulièrement rudes. La température est descendue jusqu'à -50°C, parfois au-dessous (un minimum à -57°C). Rien que pendant l'hiver 1999-2000, les éleveurs mongols ont perdu trois millions de têtes de bétail.
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Il n'y a pas que des éleveurs nomades en Mongolie. La capitale Ulaabaatar rassemble une part importante de la population du pays. Et parmi la population d'Ulaabaatar, il y a beaucoup de familles pauvres, avec des parents sans travail, malades souvent, vivant dans des baraquements de fortune. Et il y a aussi des enfants des rues, à Ulaanbaatar. La capitale de la Mongolie est la seule capitale au monde où la température moyenne annuelle est négative. Quand il fait trop froid, les enfants des rues descendent sous terre, pour se réchauffer auprès des conduites d'eau chaude.
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La santé des Mongols n'est pas toujours bonne : la tuberculose et autres infections pulmonaires sont favorisées par l'insuffisance de la ventilation dans les yourtes.
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La chute du communisme et la disparition de l'U.R.S.S. a précipité la Mongolie vers l'économie de marché. Le passage a été brutal et les conséquences pas toujours bénéfiques. Les
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La peste est une menace latente : les marmottes véhiculent la peste, tout en y étant assez résistantes. Rassurez-vous, on ne signale que quelques cas annuels (pas plus qu'aux USA par exemple). Ces quelques cas proviennent de la chasse aux marmottes, en juillet et août.
Rappelons que le bacille de la peste est transmis de rongeur à rongeur par les puces. La puce du rongeur peut occasionnellement piquer l'homme.
Dans ce cas, le bacille infestera l'organisme par la voie lymphatique (peste bubonique), et parfois directement par le sang (peste septicémique). La contamination peut atteindre d'autres organes, comme les poumons. La maladie peut alors se transmettre d'homme à homme par aérosol, et de façon extrêmement contagieuse.
Comme je l'ai dit, rassurez-vous : la peste est présente sur tous les continents (sauf l'Australie) mais l'OMS ne signale que quelques cas par an en Mongolie : en 1996 six cas, en 1997 quatre cas occasionnant deux décès.
À titre de comparaison, aux USA : en 1996 cinq cas dont deux mortels, en 1997 quatre cas dont un mortels. (Source : OMS, www.who.int/fr/ )
Donc si vous vous sentez assez courageux pour aller aux USA, alors vous êtes suffisamment courageux pour aller en Mongolie !

Mais penchons-nous un peu sur les...

Développements récents de l'économie mongole et perspectives

Dans l'économie mongole, deux secteurs sont incontournables :
le secteur agricole et le secteur minier.

Dans le paragraphe précédent, nous avons évoqué les conditions difficiles dans le secteur agricole, et la précarité de l'élevage extensif dans des conditions extrêmement rudes.

Dans un article indépendant datant de 2010
- MONGOLIE - PERSPECTIVE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE -,
nous avions annoncé les tractations (entre compagnies minières et pouvoir politique mongol) en vue d'une mise en valeur de gigantesques ressources minières.
D'une part, un énorme gisement de cuivre, Oyu Tolgoi.
D'autre part, un colossal gisement de charbon, Tavan Tolgoi.

En cette année 2013 doit commencer l'exploitation du gisement d'Oyu Tolgoi mais des tensions - encore récemment, entre le pouvoir mongol et les compagnies minières - ont un peu retardé cette mise en exploitation (je vous passe les détails).

Plus importante que ces difficultés de partenariat est la question :
Qu'est-ce que la population de Mongolie indépendante va retirer de l'exploitation du sous-sol national ?

Nous nous posions déjà cette question dans l'article cité ci-dessus :
je ne peux que vous y renvoyer - cet article est toujours d'actualité, je ne vois pas grand-chose à y retoucher -...,
et je vous rappelle le problème prégnant de la pauvreté et des inégalités sociales en Mongolie, illustré dans cet article-ci par un indicateur souvent utilisé : l'indice de Gini des revenus.

Autre question importante soulevée (comme un nuage de poussière et de suies) par l'exploitation minière :
Quel impact sur l'environnement ? (à court, moyen et long terme.)

À propos d'environnement, et en nous éloignant des sites miniers, signalons que Ulaanbaatar (Oulan Bator en français) est une ville extrêmement polluée.

Évidemment, il faut toujours rester optimiste.
Les Mongols aiment leur culture et leur pays, et on peut espérer que de bonnes décisions seront prises au sein de cette jeune démocratie.

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Rappel :
Article sur l'exploitation minière en Mongolie
et sur les perspectives économiques et sociales :
MONGOLIE - PERSPECTIVE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE


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