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MORIN KHUUR & URTIIN DUU
16 février 2009

MONGOLIE - PERSPECTIVE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

-----------------------2010-02-16 V1-----
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MONGOLIE -
PERSPECTIVE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

Catégories : science économique,
statistiques sociales, réflexion stratégique

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Article connexe :
Mongolie et pauvreté,
Comment calculer l'indice de Gini des revenus
http://mongoliamusic.canalblog.com/archives/2009/03/30/17247927.html
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Conseil pour naviguer sur ce blog
Pour écouter le morin khuur (vièle-cheval), l'urtiin duu (chant long) et d'autres chants mongols, pour voir des costumes traditionnels, ...
consultez la liste des principaux articles du blog:
Sur les chemins du long voyage
http://mongoliamusic.canalblog.com/archives/2010/02/18/16855989.html

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La Mongolie dont nous parlons ici est la
Mongolie indépendante.
D'abord, je vous invite à lire attentivement le plan.

PLAN

A) Pauvreté en Mongolie
B) Ressources de la Mongolie
C) Les menaces qui pèsent sur les pays disposant d'importantes ressources naturelles
D) Mongolie: la perspective économique proche
E) Les projets des dirigeants mongols
F) Un défi pour la démocratie mongole
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A) Pauvreté en Mongolie

Sur ce blog, nous avons déjà évoqué un fait :
une grande partie de la population de la Mongolie vit dans la pauvreté.

Sur ce sujet, deux données:
En Mongolie
#
32% de la population vit avec moins de 1,25 dollar par jour.
# 29% de la population est sous-alimentée.
Année:
2005 - Source: ONU.

En termes concrets:
pour une grande partie de la population, impossible de manger correctement, impossible de se soigner correctement, impossible de payer des études à ses enfants.

B) Ressources de la Mongolie

La Mongolie est traditionnellement un pays d'
élevage extensif.
Les salaire extrêmement bas ont attiré la création d'une industrie manufacturière pourtant insuffisante (le chômage n'est pas négligeable).
Le sous-sol de la Mongolie recèlent d'importants gisements de
cuivre, d'or, d'uranium et de charbon.

C) Les menaces qui pèsent sur les pays disposant d'importantes ressources naturelles

Hélas, d'importantes ressources naturelles ne suffisent pas à assurer le développement d'un pays, ni un mieux-être pour sa population.

Ainsi, de nombreux pays africains disposent d'importantes ressources naturelles: pétrole, bois, diamants selon les cas.
Alors même que ces ressources sont abondamment exploitée, rares sont les populations africaines à avoir vu leur sort s'améliorer.

De 1978 à 2008, au Nigéria le Produit Intérieur Brut par habitant n'a quasiment pas augmenté: cela signifie que l'extraction du pétrole nigérian a produit des royalties qui n'ont pas été investies dans l'appareil productif.

En 2008, le PIB par habitant au Vénézuéla était plus élevé qu'en 1977. Là aussi, le développement n'a pas suivi. Et comme le président vénézuelien vient de dévaluer de moitié la monnaie nationale, les choses ne vont pas s'arranger de sitôt.

Rappelons un risque évident: l'argent tiré de l'exploitation du sous-sol peut aller enrichir une caste dirigeante sans apporter aucune amélioration au sort de la majorité de la population et sans améliorer les capacités du pays à créer de la richesse sur le long terme après épuisement des ressources naturelles.

Mais ce n'est pas là le seul facteur de risque.
D'autres risques sont moins évidents et requièrent une analyse économique.

Pendant les années 1960... l'exploitation de ''nouveaux'' champs de gaz naturels au Pays-Bas a soudainement gonflé les revenus de ce pays. Avec quelles conséquences? La monnaie nationale s'est nettement appréciée, rendant l'industrie manufacturière beaucoup moins compétitive et réduisant la profitabilité des entreprises de ce secteur.
C'est ce qu'on a appelé « le mal hollandais ».

Il y a des choix politiques et économiques qui permettent à un pays d'éviter de tomber dans ce mécanisme néfaste. Mais nous n'en parlerons pas ici, car dans cet article nous nous bornons à examiner la réalité.

La réalité, en l'occurrence, c'est la perspective économique proche pour la Mongolie.

D) Mongolie: la perspective économique proche

Deux grands gisements vont être mis prochainement en exploitation:
# Oyu Tolgoi -gigantesque gisement de cuivre et d'or- va être exploité conjointement par les compagnies « Ivanhoé Mines » (basée au Canada) et « Rio Tinto » (basée au Royaume-Uni). Rio Tinto est un géant mondial du secteur minier.

# Tavan Tolgoi -gisement de charbon- pourrait être exploité par...? D'après nos renseignements, le gouvernement est en pourparlers avec plusieurs firmes dont « Peabody Energy Corp. », compagnie basée aux USA.
Dans ce type de discussions, l'enjeu est évidemment le partage des revenus entre
d'un côté le pays qui loue ou cède le gisement et de l'autre la compagnie minière qui apporte son savoir-faire technique, son personnel d'encadrement, son matériel, sa capacité organisationnelle.

Soit dit en passant, les revenus fournis par la grande mine de cuivre et d'or seront nettement plus importants que ceux -non négligeables- fournis par la mine de charbon.

Globalement, ces deux gisements fourniront à la Mongolie un brusque afflux de ressources supplémentaires.
Paradoxalement, c'est une situation à risque, comme nous l'avons vu plus haut.

Comment gérer cette situation?
Comment utiliser ces nouveaux revenus?

Les besoins ne manquent pas.
Quels sont les projets des dirigeants mongols?

E) Les projets des dirigeants mongols

Le President Tsakhia Elbegdorj and Premier Ministre Sukhbaatar Batbold sont conscients des risques économiques.
En particulier ils connaissent le « mal hollandais ».

Le President Tsakhia Elbegdorj est diplômé de la « Kennedy's school of governement » de Harvard et a aidé à traduire en langue mongole « The Mystery of Capital », livre de Hernando de Soto, économiste péruvien qui connaît bien les sujets évoqués plus haut et qui est venu ce mois-ci en Mongolie où il a rencontré le Président et le Premier Ministre.
Conscients des risques qui pèsent sur un pays pourvu d'abondantes ressources naturelles, les dirigeants mongols ont déjà choisi un certain nombre d'orientations.

Les dirigeants mongols ont l'intention, lorsque le prix des matières premières sera élevé, de mettre de côté les royalties supplémentaires résultant de cette augmentation de prix. Cette cagnotte pourra être sollicitée en période défavorable, afin d'équilibrer les ressources de l'État.
Cette mesure s'inspire de l'exemple donné par le Chili est un très important producteur de cuivre. Mais le prix des matières premières est extrêmement volatil.

En 2009, le gouvernement mongol a créé un « Fond de Développement Humain » afin de distribuer un peu de royalties aux citoyens. Remarque: attention, on voit poindre le risque du clientélisme: donner de l'argent afin de se faire réélire.

Le gouvernement veut aussi réformer le système de protection sociale afin de cibler l'aide sociale sur les pauvres. Mais nous ne savons pas exactement quels citoyens seraient concernés par cette aide sociale. Nous avons montré plus haut que, selon le critère du revenu disponible, les pauvres constituent une part très importante de la population mongole. Les besoins en matière de protection sociale sont donc immenses. D'un point de vue économique, la meilleure voie serait de créer des emplois productifs, c'est-à-dire de créer des emplois qui créeraient de la richesse.

Le gouvernement veut aussi investir dans le réseau de transport, en améliorant les réseaux routiers et ferroviaires, non seulement pour améliorer l'accès aux mines, mais aussi pour permettre aux éleveurs d'amener plus facilement leurs animaux sur les marchés.

Rappelons que le territoire de la Mongolie s'étend sur 1_566_500 kilomètres carrés ( trois fois la surface de la France métropolitaine). Sur ce vaste territoire vivent environ 2_800_000 habitants (année: 2006), dont 40% vivent dans les zones rurales. À elle seule, la capitale Ulaanbaatar compte 1_000_000 habitants (même date).

F) Un défi pour la démocratie mongole

Conscients des risques économiques engendrés par l'exploitation des riches ressources naturelles du sous-sol, les dirigeants espèrent qu'un bon fonctionnement démocratique permettra de bien négocier la nouvelle situation.

De fait, les critiques pleuvent sur le gouvernement.
Journalistes, militants et de nombreux parlementaires reprochent à l'équipe dirigeant de ne pas suffisamment lutter contre la pauvreté et le chômage.
Par exemple au cours du forum économique mongol qui s'est tenu les 8 & 9 février 2010.

Le Premier Ministre a l'intention de publier sur Internet les contrats entre l'État et les sociétés minières.
(Remarquez que, quand un contrat est signé, c'est trop tard pour réagir: les jeux sont faits.)

En tout cas, le gouvernement est attendu au tournant.

Sanjaasuren Oyun, docteur en sciences de la Terre et parlementaire depuis douze ans, fait pression pour que le gouvernement se garde de la voie facile qui consiste à distribuer de l'argent aux citoyens: ce sera... ou ce serait... une mesure très populaire, à n'en pas douter. Et une mesure très efficace pour gagner ou garder le vote des électeurs.
Sanjaasuren Oyun préfèrerait que l'argent provenant de l'exploitation des mines soit utilisé pour améliorer les infrastructures et pour créer des emplois.
Évidemment, il y aurait deux façons de créer des emplois:
# Soit gonfler déraisonnablement l'administration de l'État, ça c'est facile.
# Soit créer des emplois productifs, c'est-à-dire des emplois qui créent de la richesse. Ça c'est plus difficile, puisque cela implique de se confronter au marché: il faudrait d'abord cerner les secteurs économiques où la Mongolie pourrait s'illustrer dans la création de richesse, (de valeur ajoutée pour être plus précis).

Voci un fait éloquent sur le niveau de vie d'une grande partie de la population mongole: dans les derniers dix-quinze ans, on a vu des entrepreneurs du textile venir monter des usine de confection en Mongolie parce qu'il pouvaient faire travailler les ouvrières mongoles à des salaires plus bas que les ouvrières chinoises.

Pour que la perspective s'améliore pour les citoyens modestes et leurs enfants, il faudra aux dirigeants mongols davantage qu'une bonne connaisse de la science économique: il leur faudra un souci sincère d'améliorer durablement le sort de leurs concitoyens défavorisés et de leurs enfants.

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